Les Mauvaises Filles dénoncent !
Besse Romane
Mauvaises filles ! un spectacle basé sur une dure réalité, mis en scène par Sandrine Lanno. A travers des personnages, la metteuse en scène dévoile des aspects cachés de la détention.
Sandrine Lanno fait partie de la compagnie « L'indicible compagnie ». Celle-ci mène un travail de création théâtrale avec des personnes détenues, femmes et hommes, du centre pénitentiaire Sud Francilien de Réau, avec à ce jour cinq spectacles. En 2018 elle a réalisé son premier film documentaire "5 FEMMES", sur les attentes de femmes détenues pour de longues peines. Elle travaille avec la même exigence dans la recherche artistique, en milieu carcéral, en milieu scolaire ou dans des centres de réadaptation. C'est une artiste engagée dans le domaine de la détention. Elle cherche, par l'art, à parler d'un monde peu connu, à modifier le regard général sur ces personnes qui ont commis des erreurs. Tout cela, en leur permettant de se réadapter dans notre monde en créant des projets en leur compagnie. A travers ses œuvres, elle offre une seconde chance à des personnes qui n'y croient plus forcément.
Dans ce fabuleux spectacle, Sandrine Lanno a demandé à Sonia Chiambretto de l'écrire en utilisant pour cela les archives sur la question des mineurs délinquants dans les années 50 à 60 à aujourd'hui pour y mettre toute l'authenticité possible. La metteuse en scène souhaitait vraiment, par ce spectacle, retranscrire la réalité dans les moindre détails. Bien que les personnages soient fictifs - détail montré par des acteurs beaucoup plus âgés que les personnages - Sandrine Lanno utilisera des événements, des règles existantes dans des endroits de redressement comme celui-ci afin de faire comprendre ce que vivent les détenu(e)s.
A l'aide de seulement trois personnages principaux, Sandrine Lanno va nous raconter la vie menée par des délinquantes mineures. L'un des points positifs de ce spectacle c'est qu'elle ne fait pas des personnages des sains, nous avons connaissance des bêtises commises qui les ont envoyées ici, ainsi qu'une partie de leur passé, nous avons affaire à des personnages totalement réels, dont la vie pourrait être celle de n'importe qui.
Le spectacle va tenter de montrer la vie dans ce monastère, au plus près de la vérité possible, notamment en utilisant une mise en scène réaliste. Dans celle-ci, Sandrine Lanno va tenter de représenter le milieu dans lequel elles vivent grâce à une chambre dont les murs sont faits de grillage. Un banc qui représente, pour elles, un moment de détente mais qui sera utilisé pour parler de leur malheur. Les trois personnages, Billie qui est âgée de 15 ans, Annette qui a 16 ans et Kaina de 13 ans, vont s'attarder sur leurs histoires passées et présentes, avec de nombreux détails, pour permettre au spectateur de comprendre et de mieux se projeter et d'y voir les personnages comme de vraies personnes.
Afin d'interpeller encore plus le spectateur, Sandrine Lanno va traiter dans son spectacle dès sujets marquants sur ce qu'elles vivent, jusqu'au plus profond de ces jeunes filles, amenant le spectateur à ressentir une certaine compassion pour elles.
Parmi l'une des scènes les plus marquantes du spectacle, l'une des filles va parler d'une des punitions terribles que lui ont infligées les sœurs dans le monastère, une punition qui pourrait être définie comme de la maltraitance envers mineure.
Des sujets concernant tous les adolescents vont être traités dans ce spectacle, le rendant encore plus authentique. Les jeunes filles parleront de fuir le monastère, avec un plan à l'appui, dans lequel elles sont maltraitées, comme n'importe quel adolescent souhaitent fuir un foyer toxique. Également, sera traité par Billie, le sujet du suicide à cause de la culpabilité qu'elle ressent face à qu'elle a fait.
Il est intéressant de noter que ce sont des sujets qui peuvent tous nous toucher et que certains ont probablement déjà vécu et c'est là-dessus que l'auteur et la metteuse en scène vont jouer.
De plus, Sandrine Lanno va utiliser tous les sens des spectateurs pour qu'ils vivent l'expérience au maximum. Le violon qui sera la musique la plus présente sur scène va amener une touche de tristesse, de délicatesse dans le monde froid dans lequel elles vivent. Une touche qui permet d'attendrir un peu plus le spectateur.
Vers la fin du spectacle, Sandrine Lanno va imaginer les filles dans une boite de nuit avec la lumière et la musique qui est associée. Ce passage permet de montrer que ces jeunes filles sont des humains comme les autres, qu'elles ne méritent pas cette vie, qu'elles ont aussi le droit de profiter et de s'amuser.
Ce spectacle, plus qu'un divertissement, ressemble de près à un documentaire sociétaire par sa démarche de dénoncer le traitement que peuvent subir les mineurs détenues. On ressent dans celui-ci, une réelle implication par la mise en scène et par l'écriture. Le spectateur se sent soudainement projeté dans un monde peu connu, voire même par un monde « tabou » dans une société où les détenus et anciens détenus sont jugés sévèrement.
Les costumes, qui ne précisent pas l'époque à laquelle se passe la pièce, permettent de ne pas fixer de période historique. Ainsi, l'auteur et la metteuse en scène se permettent de dire que ce qui se passe là et à la fois passé et présent. A première vue, les costumes des personnages ne sautent pas aux yeux des spectateurs puisqu'il s'agit de tenues portées dans la vie de tous les jours, qu'on peut croiser souvent dans la rue. Celui-ci, pouvant paraître anodin, est finalement un élément clé de la pièce puisqu'il reflète une actualité dans sa dénonciation.
A la sortie de ce spectacle, le spectateur ressent un conflit intérieur avec des nombreuses questions qui viennent se poser comme : méritent-elles tout ça malgré leurs erreurs ? Il faut les punir de façon à ce qu'elles ne recommencent pas mais où se trouve la limite ?
Ce spectacle est basé essentiellement sur la révélation de faits non connus du public parlant d'un problème de société. Il nous pousse à réfléchir tout en nous divertissant. Il n'y a là aucun passage qui peut heurter la sensibilité des plus fragiles et pourtant, le spectacle est assez perturbant en lui-même. Bien que les sujets soient simplement abordés et non montrés, la proximité qui est créé entre le spectateur et les personnages poussent notre imagination à le voir nous-même. De plus, ce spectacle peut, intérieurement, bousculer toutes nos croyances, nos valeurs sur le sujet des détenus en modifiant totalement notre regard sur eux.
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